Les Etats-Unis ont pesé de tout leur poids pour réconcilier la Turquie et Israël dont les relations étaient au plus bas depuis mai 2010 quand l’armée israélienne a tiré sur un bateau en route pour la bande de Gaza, soumise alors à un blocus maritime de l’Etat hébreux, tuant neuf ressortissants turcs.
Lors de sa visite cette semaine en Israel, le président américain Barak Obama a réussi à convaincre le Premier Ministre, Benyamin Netanyahu, a présenter ses excuses à la Turquie pour la mort des ressortissants turcs, enregistrant ainsi le résultat le plus probant de toute sa tournée au Moyen Orient où ses entretiens avec les responsables de la région n’ont pas permis, comme il était souhaité, de raviver le processus de paix entre Palestiniens et Israéliens.
Washington estimant la normalisation des relations Israélo-turques essentielle à la stabilité au Moyen-Orient et au processus de paix, M. Obama, juste avant de quitter Israël, a tendu son propre téléphone à M. Netanyahu d’où ce dernier a appelé le Premier ministre de la Turquie Recep Tayyip Erdogan et lui a présenté des excuses pour la mort de ses concitoyens.
Il lui a par la suite envoyé une lettre d’excuses, promettant d’assouplir les restrictions sur l’approvisionnement de la Bande de Gaza, mais n’a pas fait allusion à la levée de son blocus aérien et maritime. Le bateau turc qui a été bombardé par l’armée israélienne faisait partie d’une flottille qui voulait justement atteindre Gaza en dépit du blocus maritime.
M. Obama tenait à réconcilier la Turquie et Israël, les deux alliés les plus puissants et les plus proches des Etats Unis au Moyen-Orient, qui étaient en froid depuis presque trois ans. Les deux parties ont, semble-t-il, accepté de reprendre leur coopération, mais ne rétabliront leurs relations diplomatique qu’une fois réglée la question des compensations qu’Israël doit verser aux Turcs.
Si Israel a finalement accepté de présenter ses excuses à Ankara, comme celle-ci le réclamait, et de renouer ses relations avec la Turquie, c’est surtout dans l’espoir de pouvoir sortir de l’isolement dans lequel il s’est trouvé après le Printemps Arabe et l’effondrement de certains de ses alliés dans la région, notamment le régime de Hosni Moubarak.
Pour certains analystes, Israel (comprenez et son allié américain) espère peut-être aussi pousser Ankara à exercer des pressions sur l’Iran pour que ce dernier abandonne son programme nucléaire et l’amener à infléchir un tant soit peu sa position quant à son refus de laisser les avions de chasse israéliens survoler le territoire turc. Pour d’autres, c’est peine perdue puisque Ankara a déjà refusé d’ouvrir son espace aérien à l’armée israélienne et ne pense pas être un jour la cible d’une arme nucléaire iranienne qui reste plutôt improbable.
Mais les deux pays peuvent coopérer sur le dossier syrien, après être arrivés à la même conclusion : la nécessité du départ du Président Bachar Al Assad mais aussi la nécessité de tout mettre en œuvre pour empêcher Al Qaeda de récolter les fruits de sa chute.
D’ailleurs, Netanyahu a clairement expliqué à l’attention de l’opinion publique de son pays en parlant de la normalisation des relations avec Ankara que Tel-Aviv avait besoin d’un allié régional pour contrer la menace qui pourrait venir de la Syrie.
Israël se dit préoccupé par le risque de voir Al Qaeda prendre le contrôle de la Syrie et de voir ses militants mettre la main sur l’arsenal de Bachar Al Assad mais pourrait toutefois approuver un gouvernement syrien islamiste pro-occidental s’il était calqué sur le modèle Turc.
La reprise de contact entre les deux pays leur permettra également de partager les grandes quantités de gaz naturel récemment découvertes en Méditerranée orientale et de reprendre leur coopération dans le domaine des renseignements, surtout militaires, et du tourisme.
Même lorsque les relations étaient au plus bas, les ventes d’armements se sont poursuivies de même que le commerce extérieur qui a atteint une valeur de 3 milliards de dollars par an.
Malgré tous les efforts des Etats-Unis pour jeter les ponts entre les deux pays, le rétablissement d’une relation stratégique israélo-turque sans nuage n’est pas pour autant garantie, notamment en raison des diatribes de M. Erdogan contre le sionisme et de la persistance d’Israel à ignorer les appels de M. Erdogan à libérer Jérusalem-Est et la Cisjordanie et à lever tout blocus sur la Bande de Gaza.