La société espagnole Terra Fecudis, entreprise de travail temporaire pourvoyeuse de main d’œuvre pour les agriculteurs français, fait face depuis hier lundi, à la justice française. L’Urssaf, qui recouvre les cotisations sociales en France, lui réclame 112 millions d’euros de dommages et intérêts.
Terra Fecundis est jugée avec trois de ses fondateurs par le tribunal de Marseille. Elle est accusée d’avoir détourné les règles européennes du travail détaché pour près de 7.000 salariés acheminés dans des centaines d’exploitations agricoles françaises entre 2012 et 2015.
La procédure de détachement permet à des entreprises de faire travailler du personnel dans un autre Etat membre sans avoir à s’inscrire au registre du commerce ni à régler les cotisations sociales des ouvriers employés en France.
Terra Fecundis n’aurait pas rempli ces conditions du détachement car elle avait une activité permanente en France et pas d’activité substantielle en Espagne. Pour les années 2012 à 2015, le Top 100 des sociétés clientes de Terra Fecundis ne regroupaient que des sociétés françaises à l’exception d’une exploitation espagnole.
L’entreprise, qui encourt une amende de 500 000 euros, et ses trois dirigeants fondateurs, qui risquent eux dix ans d’emprisonnement et une amende de 100 000 euros, sont donc jugés pour travail dissimulé et marchandage en bande organisée.
Ce dernier délit est un prêt de main d’œuvre à but lucratif qui, selon la citation à comparaître, aurait causé plusieurs préjudices aux salariés comme une rémunération en dessous du minimum légal, une absence de majoration des heures supplémentaires, et une atteinte aux droits au chômage en Espagne par minoration des jours travaillés déclarés aux organismes sociaux espagnols.
Pour ses détracteurs, l’histoire de cette société symbolise le dumping social au sein de l’Europe. Terra Fecundis a été créé par deux frères et leur ami d’enfance en 2001, après l’installation de la famille à Murcie, en Espagne. La société a rapidement connu une forte croissance. En 2014, l’entreprise d’intérim espagnole fournissait en main d’œuvre 405 clients en France pour un chiffre d’affaires de 50 millions d’euros.