Les images diffusées par l’agence Reuters sont terribles et pourtant si banales. On voit un cortège, au milieu duquel émerge un drapeau palestinien, s’avancer pacifiquement dans la campagne de Cisjordanie, du village palestinien de Turmus Ayya, près de Ramallah, en direction de la colonie d’Adei Ad. Le but de ces dizaines de manifestants qui s’étaient rassemblés hier : protester contre la colonisation israélienne qui se traduit, concrètement, par le vol de terres et la destruction de centaines de vergers et d’oliveraies. Des oliviers, justement, ces Palestiniens, épaulés par des volontaires étrangers, et à la tête desquels se trouvait Ziad Abou Eïn, le ministre de l’Autorité palestinienne en charge des questions de colonisation, entendaient bien en planter. Un double geste : celui, d’abord, du refus de se voir dépouiller de cette terre qui a appartenu à leurs ancêtres depuis des centaines d’années ; celui enfin du rameau de la paix, brandi devant des dizaines de soldats lourdement équipés.
L’armée israélienne est là pour briser la résistance des Palestiniens. On voit, sur les images de Reuters, un soldat arracher le drapeau palestinien des mains d’un vieil homme la tête recouverte d’un keffieh et en briser la hampe. Un autre se rue sur un manifestant pour le mettre à terre. D’autres encore tirent des grenades lacrymogènes. Bien qu’on ne les voie pas, on imagine les colons protégés par cette armée d’occupation.
Il en faut plus aux Palestiniens pour se décourager. Ils avancent jusqu’au point de contact avec les militaires. Trois d’entre eux s’en prennent au ministre, en lui portant des coups à hauteur de la poitrine et en l’empoignant au col et à la gorge. Ahmed Bitawi, le directeur de l’hôpital de Ramallah, a fait état de coups portés au torse. Kamal Abou Safaka, un collaborateur du ministre, a rapporté un coup de crosse. Cinq minutes après, Ziad Abou Eïn s’est affaissé dans l’herbe en se tenant la poitrine. Évacué en ambulance, le responsable palestinien est décédé de ses blessures. Il avait cinquante-cinq ans.