Accusations fondées ou moyen détourné pour faire pression sur le président Rwandais, Paul Kagame, épargné jusque-là par les critiques américaines, la charge portée par les Etats unis contre le gouvernement de Kigali marque en tout cas une rupture dans la relation de Washington avec l’homme fort du Rwanda.
La sortie de deux responsables américains qui ont accusé, coup sur coup, le gouvernement rwandais d’être derrière la crise qui secoue le Burundi voisin est une première. Devant la commission des affaires étrangères du sénat américain, la secrétaire d’Etat adjointe pour l’Afrique Linda Thomas-Greenfield a ainsi fait état mercredi d’activités déstabilisatrices du Rwanda contre le Burundi.
Des rapports émanant de collaborateurs sur le terrain « laissent penser que le gouvernement rwandais est impliqué dans des activités déstabilisatrices au Burundi », a précisé la responsable américaine. Les activités de déstabilisation consistent notamment dans le recrutement de réfugiés burundais au Rwanda, qui seraient armés et enrôlés dans les rangs de l’opposition contre le régime du président du Burundi, Pierre Nkurunziza.
Une déposition qui a été suivie par une autre devant la même commission par Thomas Perriello, émissaire spécial de Washington pour l’Afrique des Grands Lacs. Perriello a fait part de sa « préoccupation » à cause du « comportement déstabilisateur du Rwanda dans la crise au Burundi ». Des préoccupations justifiées, selon lui, par « le recrutement de réfugiés burundais dans des camps au Rwanda afin de participer à des attaques armées conduites par l’opposition burundaise armée contre le gouvernement burundais ».
Les observateurs estiment que cette nouvelle attitude de Washington trahit une probable modification de la politique américaine dans la région des Grands Lacs. S’ils s’étaient jusque-là opposés à la réélection du président Nkurunziza en juillet 2015 pour un troisième mandat à la tête du Burundi, ce qui a précipité le pays dans un chaos politique et sécuritaire, les Etats unis semblent adopter la même attitude envers le président du Rwanda Paul Kagame.
Ce dernier, au pouvoir depuis 1994, nourrit en effet les mêmes ambitions de se maintenir encore. Il a fait voter une réforme de la Constitution qui lui permet d’être réélu jusqu’en 2034.